J-M Henri Tinténiac (17?? - 1805)Toutes les fables

On doit au Marquis de Tinténiac, l'ouvrage Nouvelles fables morales & satiriques, par J.-M.-Henri de Tinténiac, 1880-1881. Je me base ici sur un ouvrage imprimé en 1880.

Courte préface :

La Fontaine a dépeint les animaux vivant sou9 la royauté ; mais il n'a pu les dépeindre vivant sous la République, qu'il n'aurait jamais pu prévoir sous Louis XI Y. Or, les animaux vivant sous la République sont tout aussi curieux et intéressants quo ceux qui vivaient sous la royauté, et il y a parmi eux do bons types qui no sont pas moins réussis dans leur genre. De la une lacune regrettable dans les fables de La Fontaine, quelque parfaites qu'elles soient. Cette lacune, je vais essayer modestement de la remplir; je dis modestement, car je n'ai pas la prétention d'imiter La Fontaine, qui est inimitable et le Prince des fabulistes, encore moins, bien entendu, de rivaliser avec lui, car je ne suis pas tant s'en faut, ainsi que le lecteur s'en apercevra, un homme de génie ; je n'ai pas même la prétention de le suivre ni de près ni de loin.

Notre but d ailleurs n'est pas le môme : La Fontaine a proche la morale indépendante enseignant à régler le plus commodément sa courte vie, et souvent même la morale du Renard (i) et môme du Loup. Quant à moi, je proche, autant qu'il m'est permis de prêcher, la morale chrétienne, l'autre n'étant quo de l'habileté purement humaine ; et c'était encore une lacune à combler ; et le besoin, surtout à notre époque de matérialisme, s'en faisait généralement sentir ; l'ouvrage donc, quelle que soit d'ailleurs sa médiocrité, ost original.

Quant au style, ce qu'on appelle la littérature, les lettres, c'est la toilette des idées ; mais si les idées ne valent rien, autrement dit sont fausses, — et toutes les vaines opinions des hommes no font pas la vérité et môme n'y changent rien, — elles n'en valent pas mieux quand elles seraient bien habillées, bien harnachées ; elles n'en sont mémo avec leurs oripeaux que plus grotesques, et la vérité nue vaudra toujours bien mieux ; d'ailleurs, le plus grand mérite d'une fable après son but moral, étant la simplicité, et môme si l'on peut, la naïveté, je n'ai cherché ni à faire du stylo, ni à plaquer des mots a effets ; il faut pouvoir être lu par toutes les classes de la société, excepte toutefois par ceux qui ne savent pas lire, quoiqu'ils nient souvent plus de bon sens que beaucoup d'autres. Dono, quoi qu'on en ait dit, les fables, ou les récits qui y ressemblent pour la forme, doivent être écrites à peu près comme on parle, à part les fautes s'il se peut.

Ainsi que je le dis au lecteur au commencement de cet ouvrage, mon intention a été do faire des satires autant que des fables ; car sans compter celles de La Fontaine, Florian, de La Mothe même, d'Aubert, etc., il y en a assez et de très bien faites ; quant aux satires, on n'en saurait trop faire, quand l'on voit toutes les turpitudes et les saloperies morales de ce bas-monde Enfin et malgré le mérite littéraire de Régnier et de Boileau, les princes do la satire française, Ion peut donner à la satire toute espèce de formes, d'autant plus que la satire en Alexandrins sur deux rimes consécutives et monotones, quand on n'a pas leur talent, se lit assez difficilement ion ne peut on lire que quelques pages à la fois) et est pour un très grand nombre de lecteurs passablement fastidieuse.

Mais je ne choque, ni ne moleste, ni n'éreinte personne, suivant les préceptes de In religion chrétienne faisant la guerre aux vices qui sont la pesto de la société, aux passions, qui sont les maladies de l'âme. comme tout le monde le sait, enfin aux préjugés et aux utopies venant tous de l'erreur, mais pas aux individus qui peuvent toujours se corriger et se guérir de tout cela.

De plus, la vie étant un combat non-seulement contre ses propres passions, mais encore à peu près contre tout le reste de I humanité, afin de ne pas se voir dépouillé et mis à nu comme un petit Saint-Jean, surtout dans ce siècle où l'on aime tant l'argent, il faut se servir do toutes ses armes. A cet effet, j'insère à la suite de celte courte préfaces diverses approbations tant d'ecclésiastiques quo de laïques, que j'ai reçues de mes fables. C'est de bonne guerre.


Au lecteur :

On ne peut plaire à tout le monde
A moins quo d'être un louis d'or ;
Car dans notre machine ronde
Plus on on a déjà, plus on en veut encor.
Donc ce modeste et simple ouvrage
Ne se flattera point d'avoir cet avantage,
Pas plus que de passer à la postérité ;
L'auteur sera content, d'abord de votre estime,
Puis d'avoir, grâce à vous, à la poste hérité,
Pour fruit de son travail, d'une somme minime,
Vu qu'il n'aspire pas à devenir cossu.
Mais, lecteur bénévole, en même temps sagace,
L'un n'empêche pas l'autre, ou je suis bien déçu,
Vous êtes bion trop perspicace
Pour ne vous être pas dès longtemps aperçu
Que je faisais de la satire,
De fables en prenant le très modeste nom.
Ce n'était pas le cas de prendre ici la lyre ;
Quoique certains disent que non,
Le style familier était seul de saison.
Mes satires de plus étant toutes morales,
C'est sur les préjugés et les illusions,
Et les vices et les scandales,
Bref sur toutes les passions,
Sur tant d'ignobles saturnales
Et de sottes prétentions
Quo je porto mes coups, sous des allusions
De bêtes do toute nature ;
Et le réalisme aura beau
Do cos vices nous faire un séduisant tableau,
Même une idéale peinture,
Moi, je les montre ce qu'ils sont :
Or ces vices ne sont qu'une caricature
Digne de toute flétrissure.
Quoique de les louer des auteurs aient le front.
Mais quand les vices je talonne,
Je ne fais de tort à personne,
Et cela ne vous peut aucunement froisser,
Chacun très libre étant d'on prendre ou d'en laisser.
Les vices ne font pas corps avec l'âme humaine,
Qui peut bien s'en débarrasser,
Comme on cherche à briser une pesante chaîne ;
Mais les trouver gentils, et les chérir ! jamais !
Pour le faire, il faut être hypocrite ou niais.
Permettez, s'il vous plaît, donc, que je continue :
Mieux vaut la vérité, fùt-elle toute nue,
Que le mensonge, même habilement paré,
Orné de mille fleurs, et d'or tout chamarré.
Contre lui tenons-nous en garde.
Sur ce, très cher lecteur, que le bon Dieu vous garde.

L'Amandier et le Poirier

L'Enfant et la Toupie

La Corneille et la Colombe

La Femme et la Poule

La Foi du Loup

La Goutte d'eau, la Mer et l'Huître

La Pie et la Colombe

La Poule et la Dinde

La Proie et l'Ombre

La Ville des Bossus

Le Cerf et la Brebis

Le Cheval malade et le Chien

Le Cochon gras

Le Fermier, le Chat et le Fromage

Le Geai et l'Avare

Le Lac et les Nuages

Le Meunier philosophe et la Mort

Le Pommier

Les Épis

Les Philosophes et la Grenouille

Un mariage remanqué