On raconte qu'un Mandarin,
Dans une ville de la Chine,
Alla dés l'aube du matin
Visiter son collègue, On se courba l'échiné,
De part et d'autre on se fit des saluts
Et force compliments. Dans le céleste Empire
Ces politesses-là tiennent lieu de vertus.
Après qu'ils eurent dit ce qu'ils avaient à dire,
Devisé des lois, des abus,
Notre visiteur se retire,
Le visité le suit, et jusqu'à son logis
L'accompagne avec courtoisie.
Fidèle aux mœurs de son pays,
En magistrat de bonne compagnie,
L'autre le conduit à son tour.
Ce respect, ces égards, cette cérémonie
Sont payés du même retour ;
Et si la nuit dans leurs demeures
N'avait pas remplacé le jour,
On les eût vus marcher mille heures
En se visitant tour à tour.
Ne critiquons pas leurs usages.
Tout peuple a son code et ses lois.
Et nous qui nous croyons plus sages,
Ne sommes-nous pas tous Chinois ?
Qui ne flatte un puissant, qui ne fait la courbette
Pour obtenir ce qu'il souhaite ?
Souvent d'un chapeau bas, d'une civilité
Dépend la fortune d'un homme.
Un salut à propos fait un pape dans Rome ;
Et dans la France un député.