Le Chandelier, la Chandelle et l'Éteignoir Henry Macqueron (1851 - 1888)

Un Chandelier, portant une Chandelle
Dont le rayon modeste et bienfaisant
Egayait un appartement,
S’imagina, ne se souvenant d’elle,
Que tout l’éclat venait de lui,
« C’est moi, dit-il, c’est moi, lorsque le jour a fui,
Qui rends au monde la lumière.
C’est moi qui tiens lieu du soleil,
Quand, fatigué de sa carrière,
Il s’en va prendre son sommeil,
A ma douce clarté, le soir, prés de la table,
Se réunit un cercle sérieux ;
Tandis que, s’égayant, l’enfance au front joyeux,
Sans craindre de Phébus l’ardeur insupportable,
Peut, grâce à moi, s’animer à ses jeux.
Oh ! genre humain, que tu m’es redevable ! »
Ce discours n’était pas insolent à moitié,
La Chandelle l'ouït, et sourit de pitié;
Réponse du mérite a la sotte arrogance.
Moins endurant fut l'Eteignoir,
Témoin muet en son coin noir,
Outré d’une telle insolence,
Il veut donner une leçon
A l’impudent qui, sans façon,
Avec l'éclat d’autrui faisait sa renommée ;
Et va, sur la mèche enflammée,
Se poser a califourchon.
« Dieux! qu’il fait nuit! dit-il à sa manière.
Mais c’est pour peu de temps, je crois ;
Car l'ami Chandelier nous rendra la lumière. »
L'ami Chandelier se tint coi.

Fable 24




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