Le Chien et le Chat Joseph Hüe (1800 - 1836)

Je ne nommerai point amis
Ces gens qui, le matin unis,
Le soir, pour quelques mots mal dits,
Pour rien, deviennent ennemis.

Un chien, un chai, hantaient même logis:
Tous deux, dès le berceau, vivaient en bons amis ;
On les citait pour leur concorde.
Mais voilà qu’un beau jour, troublant ce long repos
Au milieu d’eux dame Discorde
Vint secouer ses funestes flambeaux :
Nos deux amis de querelle se prirent.
Pour un os, ils se battirent.
Ce ne fut plus entre eux, de ce jour, qu’alternats,
Pour un oui, pour un non, rixe toujours nouvelle.
Cris et coups, bref, guerre continuelle.
Pour terminer tous ces débats,
A certain singe ils recoururent,
Et devant lui, tous les deux, comparurent,
Le chat disant que le chien désormais
Ne pouvait plus le laisser vivre en paix,
Tandis que le chien au contraire
Devant le juge prétendait
Que le chat à tort se plaignait
Et d’un rien faisait une affaire.
Après que des deux parts on eut bien conteste,
Bien long-temps crié, dispute,
Sur ceci, sur cela, sur mainte et mainte chose,
Le juge, voyant clair à la fin dans la cause,
Met son bonnet, et commandant
A nos deux plaideurs le silence,
Puis tour à tour les regardant,
Prononce ainsi la sentence :
« Considérant que toi, Raton, contre le chien,
» As porté plainte pour rien,
» Que pour toi, maître chien, ta mutine cervelle
» Ne médite jamais que bataille et querelle,
» La Cour donc, attendu que vos esprits hargneux
» Méritent même réprimande,
» Vous condamne aux dépens tous deux ;
» Et de plus, sur-le-champ payez chacun l’amende. »

Dans cette fable l’on comprend
Sans doute qui j’ai voulu peindre,
Deux écoliers qui vont l’un de l’autre se plaindre?
Deux coupables qu’on doit punir également.

Fables nouvelles en vers, à l'usage de l'enfance, 1837




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