L'Écrevisse et les Goujons Pierre Chevallier (1794 - 1892)

Voyant un jour une écrevisse
Qui cheminait à reculons,
De jeunes et lestes goujons,
Espiègles remplis de malice,
Lui dirent : — La maman, quel profit trouvez-vous
A marcher de cette manière ?
Chez vous les yeux, répondez-nous,
Seraient-ils placés par derrière ?
Les écrevisses sont poissons,
Ou tout au moins de l'aquatique monde,
Pourquoi donc en avant ne fendez-vous-pas l'onde,
N'avancez-vous jamais qu'en arrière, à tâtons ?
A cette ironique boutade,
L'animal au pas lent ne put dire pourquoi,
Et comme un sot demeura coi.

Faites même demande à certain rétrograde
Qui n'a d'aller ainsi le plus mince sujet :
Comme mon écrevisse il restera muet.

Livre III, fable 16




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