Dans une plaine sablonneuse,
Une fourmi laborieuse
Allait, suant, chercher de l'eau.
La dame était peu courageuse ;
Voyant venir un chameau,
Elle pâlit et recule.
L'animal bossu
Trouve cela ridicule,
Et dit: « Pour qui me prends-tu ?
J'ai de la vertu,
Et peux te rendre service,
Car, ma chère, en vérité,
Le ciel est plein d'injustice !
Tu ne peux de sa bonté
Faire grand bruit dans le monde.
Quelle pauvreté !
Et, si je ne te seconde,
Tes jours sont un triste bien !
Oui, tout peut te nuire :
Un souffle, un regard, un rien !
Je te vois sourire,
Va, tu te moques de moi ?
Je te plains, ma mie,
Et je prendrai, malgré toi,
Grand soin de ta vie. »
Il dit... et n'est plus !...
Sortant d'un antre sauvage,
Un tigre, écumant de rage,
Malgré ses cris superflus,
En fait un affreux carnage !
La faible fourmi,
Sous un grain de sable
Se cache, et dit: « Mon ami,
Il est souvent agréable
De n'ètre pas apparent,
Adieu, protecteur capable...
Va, le ciel est mon garant ! »