Dans un temple payen, on prétend qu’autrefois
Une divinité de bois
Avait le don de prophétie ;
De ses sages avis la foule était ravie,
De tous côtés on accourait ;
Aussi d or et d’argent sans cesse on la couvrait ;
On vous la chamarrait des pieds jusqu’à la tête ;
Des offrandes sans nombre encombraient ses autels ;
Le plus riche ornement composait sa toilette ;
Par l’avidité des mortels,
De prières, de vœux tout le jour étourdie,
D’un nuage d’encens elle était assaillie.
A l’oracle chacun croyait aveuglément.
Tout-à coup, sans qu’on sût ni pourquoi, ni comment.
O surprise ! ô scandale !
L’oracle évidemment commence à radoter ;
Dans chaque réponse il signale,
Sitôt qu’on vient le consulter,
La plus absurde incohérence,
Et dans cette triste occurrence,
Frappé d’étonnement chacun se demandait :
(Tout en craignant encor de penser en impie,)
Mais qu’est-il devenu ce don de prophétie,
Qui jusqu’ici le distinguait ? –
Voici le secret dé l’affaire :
Notre idole était creuse ; on y faisait poser,
Probablement en grand mystère,
Un prêtre intelligent pour y prophétiser ;
Et tant qu’un pareil homme occupait cette idole,
De l’oracle partait la voix de là raison ;
Mais si quelque imbécile allait jouer ce rôle,
L’oracle devenait alors un franc-oison.
On prétend qu’on a vu dans mainte et mainte affaire,
Plus d’un juge autrefois montrer du jugement ;
Mais ce n’était, dit-on, je ne sais si l’on ment,
Qu’à l’aide d’un bon secrétaire.