La Poule couveuse Jean-Jacques Porchat (1800 - 1864)

Une Poule au printemps souhaitait d’être mère.
Elle gloussait : cris superflus.
Chaque jour l'avare fermière
Levait les œufs nouveau-pondus.
« Cherchons, dit-elle enfin, un réduit solitaire,
Qui ne soit connu que des Dieux.
Du voleur les mains criminelles
N’y viendront pas, comme en ces lieux,
Enlever mon bien sous mes ailes. »
Elle s’enfuit. Dans un bosquet
Elle aperçoit des œufs sans maître.
« Bon ! C’est, dit-elle, ouvrage fait.
Le Ciel m’amène ici peut-être,
Afin d’accomplir mon souhait. »
Sur la couvée elle se place,
Et la quitte à peine un moment,
Quand ta faim de son nid la chasse.
L'espoir lui tient lieu d’aliment.
Cependant un grand mois se passe.
Point de poulets encore ; elle attendait toujours.
« Eh! quoi, dit-elle, impatiente,
Aurais-je mal compte les jours ?
Quand pour chercher ma vie aux environs je cours,
Serais—je trop longtemps absente ?
Désormais soyons diligente,
Et faisons nos repas plus courts. »
Pour son malheur ainsi fit-elle.
Victime enfin de ses efforts
Et de la famine cruelle,
La Poule, à son nid trop fidèle,
Expire en couvant des œufs morts.

Elle est morte aussi l’espérance
Que l'insensé couve ici has.
Le temps fuit, le terme s’avance,
Et les poussins n’éclosent pas.

Livre IV, fable 8




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