Dans son manoir un parvenu
Fier de son riche revenu
Donnait un festin magnifique.
Vins exquis, bonne chère, excellente musique ;
Grâces aux soins d'un ami vigilant,
Ordonnateur de cette belle fête,
Rien n'était épargné. Pour la rendre complète,
Un feu d'artifice élégant
Dans lequel Ruggieri déployait son talent,
Devait terminer la journée.
Une superbe et légère fusée
Qui n'attendait que le moment
Où vers le ciel elle serait lancée,
Avise un solitaire et modeste flambeau
Qui, placé sur la cheminée,
Éclairait faiblement un des coins du château.
« Tu fais là, conviens-en, une triste figure,
Dit-elle d'un ton fat. Moi, bientôt dans les airs
Je vais faire jaillir de scintillants éclairs,
Et d'un bruit formidable étonner la nature. »
« Mais, reprit le flambeau, ces feux, ces sons bruyants,
Combien dureront-ils ? D'une douce lumière
J'éclairerai durant longtemps
De ce chàteau les heureux habitants :
Toi, vers le séjour du tonnerre
Si tu prends un rapide essor,
On te verra plus vite encor
T'éteindre, et lourdement retomber sur la terre. »