Le Léopard et le Lapin Théodore Lorin (19è siècle)

Un léopard, terreur de la contrée,
Passa, sans y toucher, près d'un pauvre lapin.
(Apparemment Son Altesse fourrée
Pour le moment n'avait pas faim.)
Le lapin exaltait la bonté sans pareille
Du vertueux, du clément léopard.
« Voilà vraiment une rare merveille
Pour l'élever si haut, lui dit un vieux renard.
Je le regarderais comme un monstre exécrable,
Si, de sa puissance abusant,
Il eût osé sur un faible innocent
Porter sa grifse redoutable. »
« Je n'ai pas tort, reprit le timide animal,
De me louer de sa clémence :
Nous devons aux tyrans de la reconnaissance
Quand ils ne nous font point de mal. »