Un fripon d'Écolier, capricieux, mutin,
Aimant d'ailleurs le jeu, comme on l'aime au collège,
Usait, Dieu sait ! du privilège,
Et s'embarrassait peu du grec et du latin :
Or, plantant là Virgile, Horace, et même Homère,
Il faisait fréquemment l'école buissonnière.
Pour mieux prendre un jour ses ébats,
Il côtoyait une bruyère.
Par hasard à ses yeux s'offre une Fourmilière.
Ce peuple, comme on sait, dans ses petits états,
Ne souffre point de gens qui se croisent les bras.
Aussi dames fourmis remplissaient bien leur tâche :
C'était plaisir de les voir, sans relâche,
En forme de procession,
Apportant ou traînant mainte provision.
Témoin de tant d'efforts et de tant d'industrie,
Que fait notre vaurien ? hélas ! le croira-t-on ?
Et quel excès de barbarie !
Le voilà tout-à-coup qui s'arme d'un bâton,
L'enfonce dans la Fourmilière,
Bouleverse, détruit, et louvre et magasins,
Écrasant plus d'une ouvrière
Qui s'occupait encore à sauver quelques grains ;
Et puis il rit de voir la république entière
Qui va essaims,, vient, se disperse, et s'enfuit par
Moins timide pourtant que ses autres compagnes,
Une fourmi s'arrête, et lui dit : Malheureux !
Tu causes notre perte.... A ce dégât affreux
Dis-nous au moins ce que tu gagnes.
- Moi ! rien, lui répond le méchant,
Mais ce jeu-là m'amuse. Il l'écrase à l'instant.
O pères ! c'est à vous que ma fable s'adresse.
De ces jeux avec soin détournez la jeunesse.
Combien n'a-t-on pas vu de ces enfants vauriens
Qui, devenus plus grands, n'aspiraient qu'à détruire !
Pour être des Domitiens,
Que leur manquait-il ?... un empire.