Par mille excès honteux démentant sa naissance,
Le Fils aîné d'un souverain,
A ses sujets, qu'il opprimait d'avance,
Faisait craindre un sceptre d'airain.
L'abus marche souvent auprès de la puissance.
A tant d'affreux déréglements
Il fallait mettre des entraves :
Le Roi mande son Fils ; il fait en même temps
Amener à ses pieds le plus vil des esclaves,
Et commande à tous deux d'ôter leurs vêtements.
Monstre, indigne du trône et du jour qui t'éclaire,
Dit à son héritier le monarque en colère,
Vois le corps de cet homme, et le compare au tien.
Regarde, considère bien
Si l'un de l'autre en rien diffère.
Parle à présent ; peux-tu me dire en quoi
D'un esclave on distingue un roi ? -
Le Fils sentit le poids de cette remontrance.
Il comprit que chaque mortel
Au seul hasard doit sa naissance,
Et qu'entre les humains la seule différence
Vient du mérite personnel.