Le Roi, son Fils et l'Esclave Antoine Le Bailly (1756 - 1832)

Par mille excès honteux démentant sa naissance,
Le Fils aîné d'un souverain,
A ses sujets, qu'il opprimait d'avance,
Faisait craindre un sceptre d'airain.
L'abus marche souvent auprès de la puissance.
A tant d'affreux déréglements
Il fallait mettre des entraves :
Le Roi mande son Fils ; il fait en même temps
Amener à ses pieds le plus vil des esclaves,
Et commande à tous deux d'ôter leurs vêtements.
Monstre, indigne du trône et du jour qui t'éclaire,
Dit à son héritier le monarque en colère,
Vois le corps de cet homme, et le compare au tien.
Regarde, considère bien
Si l'un de l'autre en rien diffère.
Parle à présent ; peux-tu me dire en quoi
D'un esclave on distingue un roi ? -
Le Fils sentit le poids de cette remontrance.
Il comprit que chaque mortel
Au seul hasard doit sa naissance,
Et qu'entre les humains la seule différence
Vient du mérite personnel.

Livre IV, fable 11




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