Autour d’un certain char des hommes se battaient.
C’était le bien de tous. Mais ils se disputaient
À qui serait cocher. Chacun à sa manière
Prétendait le conduire. Armés d’une lanière
Le brun criait : à hue ! et le blond : à dia !
Le rouge paria
Que ses bais attelés au pesant véhicule
Voleraient sur la voie en Pégase d’Hercule.
Les autres s’opposant qu’il roula de ce pas,
Le char fut mis en branle avec bruits et fracas ;
Il franchit les fossés, rase les fondrières,
Cahote brusquement sur de gros tas de pierres ;
Le cheval gris s’abat, le bai galope ardent ;
On tremble épouvanté craignant un accident.
La peur ne calme point la furieuse rage
De nos automédons ; ils fouettent l’attelage,
Et le char relancé, tiré de tous côtés
Verse, blessant à mort plusieurs des entêtés.
Quelques cochers tués, sont, pour la concurrence
Quelques rivaux vaincus ; béni soit l’occurence !
Le dernier survivant sans contestation
Du siège disputé prendra possession…
Erreur ! profonde erreur ! dix de morts, quinze arrivent,
Et les ambitieux le battent, l’invectivent.
Lecteur, à ces Phébus, à leur mortel combat,
Reconnais que ce char est celui de l’État !