On dit qu'un corps municipal,
Se trouvant à l'étroit dans la maison commune,
Décida qu'on en ferait une,
Pour remplacer l'ancien local.
Pour la discussion nn ouvre la séance ;
Chacun parle à son tour,
Bref, pour couper au court,
On veut un monument de certaine élégance.
Le luxe était alors partout :
La moindre église avait trois cloches ;
Le fin soulier vernis remplaçait les galoches
Mémo au village !... on était fou.
Mais revenons à la maison d'écolo :
Un orateur prend la parole.
Avant, dit-il, d'aller plus loin,
Je vous demande en grâce
De ne pas vous presser de nous changer do place
Quand-nous avons tout sous la main.
Sur la vieille maison élevez un étage,
Pour loger le conseil et votre instituteur ;
Vous aurez dans le bas, en faut-il davantage,
Cuisine, école, et cabinet du percepteur.
Cela peut être fait pour moitié de la somme
Que l'architecte assigne au nouveau bâtiment ;
Réfléchissez-y bien, vous êtes sans argent,
Des deniers communaux il faut être économe.
Emplois, chemins, église, ont déjà bien coûté :
N'imitons pas dame Cigale
Qui dépensa son bien en chantant tout l'été;
De la sage Fourmi pratiquons la morale.
Elle entassa son bien pour passer les hivers,
Ne jetons pas le nôtre à tort et à travers.
A ces mots le conseil ; sous cape, se mit à rire ;
Sous cape aussi, l'orateur semblait dire :
Rira bien qui rira le dernier,
Quand il faudra payer ;
Quand il faudra dire au village :
Il faut vendre du pâturage
Pour dix ou douze mille francs,
Pour mieux loger vos t'iers petits enfants.
Ne craignez-vous pas qu'on vous dise,
En franc Picard : vous faites une bêtise.
Ne touchez pas à votre bien :
Rehaussez la maison, c'est le plus sûr moyen.
Pour atteindre le but, modérez votre course,
Consultez votre force et surtout votre bourse.