L’Ours et le Carlin Baron de Stassart (1780 - 1854)

Mes amis, sans doute à la foire
Vous aurez vu les chiens savants ?
Un carlin, par ses tours, amusait les passants,
Et l’on pouvait à peine croire
Ce qu’en racontaient les enfants :
Pourtant, au milieu de sa gloire,
Jamais il n’avait de repos ;
Le bâton roulait sur son dos ;
Il faisait assez maigre chère;
De lait pas une goutte! il buvait de l’eau claire.
Des histrions, ainsi que des héros,
C’est là, je crois, le régime ordinaire.
« Qui mettra fin à tant de maux ? »
Disait le Roscius , en poussant des sanglots,
Et s’adressant à son confrère,
Un ours , qui jamais ne riait ;
Mais, si le patron s’approchait,
Le chien soumis faisait l’aimable,
Il prenait un air agréable,
Et même il lui léchait la main.
Bientôt l’ours, indigné d’un manège semblable,
S’écria : « Morbleu ! mon voisin,
« Pourquoi te plaindre de ton maître?
« Pourquoi gémir de ton destin?
« Quand on pense en esclave, on mérite de l’être. »

Je partage l’avis de cet ours plein d’honneur :
Gardons la dignité sous le joug du malheur.





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