Le Bélier nommé juge par le Sénat des Animaux Baron de Stassart (1780 - 1854)

Les animaux vivaient en république :
Etait-ce pour eux l’âge d’or ?
Que répondrai-je? un non serait trop laconique.
La liberté sans doute est un trésor;
Pourtant le pouvoir monarchique,
Qu’il ne faut pas confondre avec le despotique,
A Montesquieu semble meilleur ;
Mais sur ce point de politique,
Laissons déraisonner plus d’un législateur.
Occupons-nous de notre affaire;
Il s’agit d’un forfait, tel que l’on n’en voit guère,
Du moins parmi les animaux :
Un dogue (passe encor si c’était la panthère!)
Venait de mettre à mort son frère.
Grande rumeur par-tout ! la race des patauds
Pour toujours est déshonorée.
Le peuple, avec acharnement,
Sur le coupable chien appelle un châtiment.
La cause est d’abord déférée
Au conseil du gouvernement ;
Mais qui chargera-t-il de cette procédure?
Sans doute un animal de poids
Dont l’attitude ferme et sûre
Donne plus de puissance aux lois.
L’ours fut l’objet de maint suffrage ;
D’autres penchaient pour le lion.
A la fin notre aréopage
Arrêta son opinion
Sur un bélier fort honnête et fort sage.
Installé dans son tribunal,
Non sans gémir, le juge débonnaire
Contre Caïn-Pataud lança l’arrêt fatal
Qui marquait son heure dernière.

Au choix que fît le sénat animal
J’applaudis fort : qu’un code soit sévère
Pour mieux protéger l’innocent!
Mais moins le juge est sanguinaire,
Plus le supplice du méchant
De terreur frappe le vulgaire.





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