Le Coq et le Renard Charles Beaulieu (19ème)

Un renard désolé d'avoir perdu sa femme,
Allait partout prônant les vertus de sa dame ;
Soupçonnant un vieux coq, peut-être avec raison,
De l'avoir signalée au chien de sa maison,
Il jura d'étrangler, sans plus, ni moins d'enquête,
Toute la gent qui porte crête.
Un jour que sur ce thème il venait de prêcher,
Sur un ton vraiment fait pour convaincre et toucher
Tous ceux de ses pareils, qui, venus pour l'entendre,
Auprès de lui s'étaient empressés de se rendre,
Le vieux coq soupçonné, se trouvant près de là,
Sur la branche d'un arbre, en ces mots lui parla :
Le ciel a de ton cœur entendu la prière,
Puisqu'il envoie ici le chien de mon logis,
A qui sans doute il a révélé ton affaire ;
Et bientôt il pourra, de tous tes ennemis,
Te venger en vengeant celle que tu regrettes,
Aussi bien que le sort,
Et la mort
De plus de vingt de mes sujettes ;
Dieu seul et toi, savez hélas !
Le chemin, par où les pauvrettes
Ont passé de vie à trépas !
De ces mots comprenant le sens et la portée,
Chacun de nos renards s'épouvante et s'enfuit.

Le scélérat, que la terreur poursuit,
Sait comment doit être acceptée
Pareille offre, et ce qui s'ensuit.

Livre II, fable 15




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