La Poule et la Poulette Eugénie et Laure Fiot (19ème siècle)

« Écoute-moi bien, mon enfant,
Disait une poule à sa fille,
Est-on jeune, belle et gentille,
Chacun vous le redit souvent :
Le Renard nous en dit autant.
Prends-y garde ! dans ma famille
A ton âge trop confiant,
Beaucoup ont péri les victiomes
D'une flatteuse vérité.
Crains le perfide dont les crimes
Se masquent d'amabilité ;
Souple et rampant, plein de finesses,
Il se rapproche, en vous flattant,
Et c'est par de fausses caresses,
Toujours mortelles, qu'il vous prend.
Ma fille, sois prudente et ferme :
Ne t'éloigne pas de la ferme,
Car le renard rôde à l'entour :
Quelqu'un l'a vu même en ce jour. »
De cet avis dédaignant l'importance
Et se fiant à sa prudence,
La poulette, un instant après,
Veut tenter la promenade,
Bien entendu, sans incartade,
Pour s'instruire par des essais.
A peine s'est-elle avancée
Qu'elle voit venir le galant,
Moitié debout, moitié rampant,
L'oeil vif et l'oreille dressée :
« Le voilà, dit-elle, il est beau.
En vérité, c'est bien dommage
Qu'il soit méchant ; mais restons sage,
Et sauvons-nous dans le hameau. »
La peur précipite sa fuite :
Elle court ; mais il n'est plus temps.
Le renard, pressant sa poursuite,
La prend, la croque à belle dents.

Fille de l'ignorance,
La curiosité
Fait succomber l'imprévoyance,
Dans le péril qu'elle a tenté.

Fables nouvelles, Livre I, Fable 5, 1851


Bien sûr, ici, on met en garde les jeunes filles contre les garçons qui veulent coucher avec elles, sans lendemain.

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