L'Araignée, la Guêpe et la Mouche

François Habert (1510 - 1561)


L’araigné avoit sa belle toile ourdie,
Et l’achevant, pour un temps la laissa ;
Mais il survînt une guespe étourdie,
Qui la rompit, et par dedans passa.
L’araigne à doncq bien fort se courrouça
De voir ainsi gaster son petit bien :
Le sens défaut, alors qu’on perd le sien.
Elle lui dit : Qui-te meut de défaire
A coup, cela que j’ai fait à loisir ?
Répond la guespe : Et qu’en as-tu affaire?
Ce que j’ai fait, je l’ai fait pour plaisir.
Ah ! dit l’araigne : or je vois bien gésir,
Morte à l’envers droiture et équité ;
Car de pécher les gros ont liberté.
Bientôt après, une mouche petite,
Cuidant passer, dedans s’enveloppa;
Dont folle fut : car l’araigne despite,
Dedans ses retz promptement l’attrapa ;
Et si souvent son tendre corps frappa,
Qu’il demeura presque tout assolé.
Le plus petit est toujours plus foulé.



Le titre original est : De l’Araignée, de la Guespe et de la Mouche

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