Le Bluet et l'Épi Frédéric Rouveroy (1771 - 1850)

Place ! place à la fleur qu'au lever de l'aurore
Sur ma tige, demain, vous allez voir éclore !
Messieurs les épis rangez-vous,
D'autre côté courbez un peu la tête ;
Savez-vous qu'il n'est pas honnête
De gêner des gens comme nous ?....
Vous êtes là plantés, Dieu sait pour quel usage !
Qu'avez-vous à montrer ? Sous un joli feuillage
Recélez-vous quelque brillante fleur ?
Quand pourra-t-on la voir ? Mon petit orateur,
Lui répond un épi, ce ton de persiflage
Croyez-moi, vous fait tort ; soyez modeste, sage,
Et ne nous vantez plus un disque sans odeur.
Si nous promettons moins nous tenons davantage ;
Ainsi, non loin de vous, souffrez quelques épis,
Et, jusqu'à la moisson, vivons en bons amis :
Nous saurons pardonner quelque chose à votre âge.

Aux dons de nature, aux faveurs de Plutus,
Si, des talents encor vous joignez l'avantage,
Jeune homme, accordez votre hommage
A ceux qui n'ont que des vertus.

Livre I, fable 5




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