Dans une riante campagne,
Au sein d'un splendide vallon,
Dans un village de Champagne,
On faisait partir un ballon.
L'aéronaute, étant un homme remarquable
Dans son métier, chacun dit-on,
Se promettait une fête agréable.
Aussi do tous côtés, ouvriers, laboureurs
Etaient venus de loin pour être spectateurs.
L'aéronaute était rayonnant d'espérance ;
Il disait : » Aujourd'hui, sans crainte, on peut partir, »
Et bientôt, dans les airs, l'aérostat s'élance
Et puis mollement se balance,
Agité par un doux zéphyr ;
Mais hélas ! tout-à-coup se forme un noir nuage
Tout menaçant d'aspect, portant eu lui l'orage,
Qu'avec terreur on voit soudain
Monter de l'horizon lointain.
Bientôt le nuage étincelle ;
La foudre éclate avec fracas.
Réduisant en morceaux la fragile nacelle,
Et le gai voyageur trouve un affreux trépas !
Voilà, de notre vie, une image fidèle,
Car parfois le bonheur ne dure qu'un moment,
La foudre vient aussi briser notre nacelle ;
Souvent, sur nous, la mort fond inopinément.
Riches, puissants, heureux, que l'orgueil dans votre âme
Ne vienne jamais s'implanter ;
Quelque grand que l'on soit, l'eau, la foudre ou la flamme,
Le temps qui détruit tout, savent bien nous dompter.
Dans la prospérité, pensons à la tempête
Qui peut à chaque instant fondre sur notre tête
Et nous mettre au cercueil ;
Songeons à l'avenir, nous bannirons l'orgueil !

Livre II, Fable 8, 1856




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