Les Loups et les Brebis Gilles Corrozet (1510 - 1568)

Se deffier des ennemys.

Sy tu fais paix à l’adversaire,
Ta prudence ne soit trompée ;
Ne luy baille pas ton espée,
Elle test tousjours necessaire.


Les Loups ont eu de toute antiquité
Guerre aux Brebis et bataille mortelle z
Fondée estoit sur faulse iniquité;
Mais les Brebis, pour garder leur querelle,.
Prindrent des Chiens, et dessoubz leur tutelle
Et saulvegarde elles se sont rengées
Pour estre mieulx des mechantz Loups vengées,.
Qui, ce voyantz, feirent guerre mortelle.
A ces Brebts tz feirent paix fourrée,
Leurs Louveteaulx baillerent pour hostaige,
Et les Brebis, par fiance asseurée,
Baillent aux Loups a leur desavantaige
Leurs tresbons Chiens ; mais ce fut leur dommaige :
Car peu aprés la guerre releverent;
Les Louveteaux aussi fort les greverent
Quand parvenus tlz furent en grand aage.
Les Brebis donc, de leurs chiens dessatstes,
Eurent Passault de ces Loups tant meschaniz ;
Furent par eulx les plus grasses chotstes,
Quand les trouvoient en estable ou aux champs.
Ceulx done quivontla treve oupaix cherchantz
A l’ennemy ne batllent leur deffence :
Car par aprés seuffrent plus griefve offence,
Et sont batus de leurs glaives trenchantz.
Fable 38


Titre original : Des Loups et ces Brebis. Texte écrit intégralement en décasyllabes.

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