Qui l'aurait cru, que des Dindons
Eussent d'orgueil l'âme enivrée ?
Pourtant la chose est avérée,
Et c'est un fait dont je réponds.

Un, de glorieuse mémoire,
Avait pu retenir l'histoire Du Phénix si vanté.
Est-ce conte ? est-ce vérité,
Disait-il ? Moi, je crois très possible la chose,
De ce doute agité,
A ses confrères il propose
De l'éclaircir. Jamais conseil
N'obtint un silence pareil.
Les plus experts Dindons de l'auguste assemblée
Parlèrent les premiers et tous bien savamment.
Après avoir raisonné mûrement,
Discuté, débattu la chose proposée,
L'un d'eux prononça gravement :
De ce Phénix l'existence est réelle ;
Et pour bonnes raisons
II a quitté sa forme naturelle
Pour prendre celle des Dindons.
Oui, cet oiseau sans doute existe ;
Et je persiste
A croire qu'il est parmi nous.
De cet avis les Dindons furent tous.

Voilà donc Phénix que l'on prouve
Être Dindon ! Eh bien ! c'est un prêté rendu.
Dans ce beau siècle prétendu
Chez nos Phénix que de Dindons on trouve !

Livre III, fable 3




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