Le rossignol est bon chanteur
Qui ose dire le contraire ?
Mais il est si mauvais chasseur
Qu'en ces bois, on ne le craint guère
Il se camouffle, vigilant,
Avant de chanter, il surveille
Ses prédateurs, mais un milan,
Malin, trompa la sentinelle.
Surpris, terrifié, apeuré,
Paralysé par le rapace
Sans espoir de se libérer
Le rossignol tente l'audace :
Toujours résigné et soumis
Et sans chercher à se soustraire
Aux griffes de son ennemi
Promet qu'il pourra le distraire.
« - Si vous voulez bien m'écouter
Je vous chanterai la romance
Qui saura bien vous envoûter
Vous inspirer de la clémence.
Je pourrais aussi, monseigneur
Entonner une ritournelle
Et m'échapper, pour mon bonheur
Alors, de l'étreinte mortelle ! »
Devant ce discours peu commun
Le milan alors lui réplique :
« - Voyons, lorsque je suis à jeun,
Tu viens me parler de musique ?
Quand bien même ta belle voix
Serait sans nulle autre pareille
Que je resterais sourd et coi.
Ventre affamé n'a point d'oreille. »