Les deux Chiens Jean-Baptiste Voinet (1976 - ?)

Il était une fois un chien plein de promesses,
Puis un autre, un bâtard, qui n’avait rien coûté
Le premier sautillait, habile et plein d’adresse,
Le second paraissait peut-être moins gâté.
Le maître désira un beau jour les instruire,
Usant de la carotte autant que de son fouet
Pour les discipliner afin que l’on admire
Ses toutous asservis, plaisants comme des jouets.

Le plus noble des deux fit des progrès rapides,
Il obéissait bien, il dansait, il sautait,
Il se tenait debout, tournait, servait de guide,
Courait vers le bâton et puis le rapportait.
De son maître ravi de tant de gentillesses,
Il recevait alors de bien beaux compliments,
Il se faisait payer d’étreintes, de caresses,
N'était jamais l’objet du moindre châtiment.

Le second, quant à lui, n’était pas aussi leste,
Il traînait à la tâche et n’obéissait pas ;
À cette agitation il préférait la sieste,
Rechignait à bouger, flânait, traînait le pas.
On malmène, on punit, on le bat, on le fouette,
On abat le bâton à lui rompre le cou…
Pas même un petit saut, pas une pirouette,
Malgré l’emportement, la fureur et les coups !

Cette animosité, cette ire toute humaine,
Ne mène nulle part et l’on perd le combat.
La colère est stérile et la violence est vaine,
Ce chien-là ne veut pas, ce chien-là ne peut pas !
Un beau jour à son maître, il lâcha sans rancune :
« Contrairement à moi, l’autre est fort et gracieux.
Je ne ferai jamais, monsieur, votre fortune,
Mais vos coups de bâton ne m’instruiront pas mieux. »

Janvier 2023


Inspirée de Laure et Eugénie Fiot. On parle d'éducation, ici.

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