Le Chasseur et le Renard Jean-François Haumont (17** - 18**)

Le renard surpris au piège d'un chasseur,
Faisait piteuse contenance :
De ta méchanceté voici la récompense,
Lui dit l'homme en fureur :
C'est en vain que tu prends l'air faux des hypocrites ;
Le châtiment que tu mérites,
Me vengera d'avoir étranglé mes poulets,
Mes pigeons, mes agneaux, et tant d'autres forfaits.
Le renard répondit : je reconnais mon crime ;
Mais j'attends mon pardon de la bonté sublimé,
D'un homme rempli d'équité.
Je fus cruel, oui, c'est la vérité.
Pressé par une faim vorace,
J'ai souvent dépeuplé la race
Des habitants de votre basse-cour.
C'était mal vous faire ma cour :
Le besoin sera mon excuse
Des cruautés dont je m'accuse.
Mais vous que la nature a comblé de ses dons,
Qui possédez d'amples provisions
De grains, de végétaux, de fruits et de racines ;
Vous, accablé de biens et de faveurs divines ;
Vous qui réunissez tant d'objets superflus,
Si nous sommes cruels, vous l'êtes cent fois plus !
La tyrannie, enfin, vous est-elle permise ?
Hommes sensuels, vous êtes des bourreaux ;
De sang-froid, excités par votre gourmandise,
Vous massacrez les pauvres -animaux.
En autrui, nous blâmons, et nous taxons de crime,
Avec un air de courroux,
Telle action, qui, pour nous,
Se travestit et devient légitime.

Livre I, Fable 13




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