Côte à côte en un Cimetière,
Deux Morts causaient fort tristement,
Quand on à fermé la paupière
On ne cause guère autrement.
Qu'étiez-vous, dit l'un, sur la terre ?
Ce que j'étais ? un armurier.
Je gagnais peu d'argent, ah le mauvais métier
En temps de paix et même en temps de guerre !
Ma femme était un vrai démon,
Mon fils un garnement, ma fille une coquette
A dire vrai je ne regrette
Ni mon métier, ni ma maison.
Eh vous, que faisiez-vous compère ?
Moi, répond-il, j'étais maçon
Vivant sans femme et sans ambition.
Quand on est tel on craint peu la misère.
Maintenant que comptés vous faire ?
Moi ? rien. Paisiblement demeurer dans ma bière
Et dormir si l'on veut d'un éternel repos,
Je crois qu'il vaut autant être en un cimetière
Que de bâtir, tailler la pierre.
Si j'avais eu de beaux châteaux
Excellent vin et bonne chère
Peut-être je voudrais revenir sur la terre
Mais pour être Maçon ou bien même Armurier
Vaut autant croyez-moi demeurer ou nous sommes
Dans notre état il n'est rien chez les hommes
Qu'il nous faille fort envier.
Lors qu'un mourant part de ce monde,
On prend le deuil, on fond en pleurs,
Comme s'il désertait un lieu semé de fleurs,
Un beau pays ou tout abonde.
Souvent il quitte sots procès,
Douleur de goutte, ou bien pauvre ménage,
On peut gaiment faire alors le voyage
Du moins est on bien fol d'emporter des regrets !