Le Fleuve et le Nuage Joseph-Marie de Gérando (1772 - 1842)

« Je te salue, ô bienfaisant nuage,
Qui voles sur ma tête et, planant sur les monts,
Pénètres en secret dans leurs antres profonds !
Je te bénis à ton passage ;
Je sais que loin de l'œil humain,
Chaque saison, ton invisible main
Renouvelle l'urne féconde
Dont se nourrit la source de mon onde.
À la terre tu fais sentir,
Par cette aimable allégorie,
Que d'en haut tout doit lui venir,
Que le ciel lui donne la vie. »
Certain fleuve au nuage exprimait en ces mots
L'élan de sa reconnaissance,
Pendant que dans les champs il promenait ses flots.
Le nuage l'entend, dans les airs se balance,
Et lui répond avec amour :
« Ce que tu crois un don n'est qu'un juste retour.
Lorsqu'à l'astre du jour, en forme de globules,
De tes humides molécules
S'élève le tribut en légères vapeurs,
Elles sont dans mon sein en secret déposées,
Se convertissent en rosées
Qui fécondent les champs et font germer les fleurs.
Dans la contrée aérienne,
De ce trésor le reste est condensé,
Demeure suspendu, par les vents est poussé,
Et revient abreuver ta source souterraine. »


Ainsi des bonnes actions
L'influence est toujours par le ciel recueillie ;
Sur l'homme vertueux ses bénédictions
Redescendent bientôt et fécondent sa vie.

Livre II, Fable 13




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