L’Émerillon disait à l’araignée :
En vérité je ne vous comprends pas ;
Vous avez toujours sur les bras
Une si nombreuse lignée,
Sans que vous fassiez un seul pas.
Pour assurer la subsistance
De tant d’enfants qui sans votre assistance
Doivent être en grand embarras.
Venez voir à mon nid comme les miens sont gras.
Mais dame ! aussi voyez ma vie.
Je vas, je viens, je parcours l’univers ;
Je me travaille et m’ingénie :
Tantôt planant sur les blés verts,
Tantôt me cachant dans la nue,
Pour fondre à point sur la cohue
De ces vils oisillons qui rampent dans les airs.
Voilà par quels moyens divers
Je me pourvois de bonne chère.
Pour vous, en vérité, ma chère:
Un beau jour vous mourrez de faim,
S’il faut toujours que le destin
Soit en quête de votre proie,
Et soigneusement vous l’envoie
Se prendre en vos minces réseaux.
Mais adieu : je vois les oiseaux
Sortir de leur nocturne asile.
Allez, allez, dit l’insecte qui file ;
Voltigez, c’est bien fait à vous ;
Pour moi, je resterai tranquille,
Sans jamais sortir de ces trous
Où le ciel Veut que je vive en Hermite :
Le ciel a varié nos goûts,
Pour qu’ils réglassent la conduite