La Rossignol et le Paon Pierre–Joseph Charrin (1784 - 1863)

Ami du monde et fait à ses belles manières,
Un Rossignol, pour ses talents cité,
Ne put vivre parmi ses frères.
De sa supériorité
Chacun d'eux jaloux, irrité,
L'accablait d'injures amères.
Hué, trahi, persécuté,
Il quitta, navré de tristesse.
Le bocage où, dans sa jeunesse
Heureux,
Il essayait ses chants mélodieux.

Chez les oiseaux d'une autre espèce,
Pensant avec raison qu'il rencontrerait mieux,
Il alla des oiseaux voir le plus orgueilleux,
Non de sa voix !… C'était du tact et de l'adresse.
« Bonjour, dit-il au Paon, favori de Junon ;
Ta beauté me séduit, je t'aime et je désire
Être l'objet de ton affection. »
— Toi, divin Rossignol, dont le talent inspire
Une enivrante émotion ;
Toi, qu'on n'entend jamais sans admiration,
Oh ! permets-moi de le le dire,
Briller au premier rang de tes meilleurs amis :
Voilà l'unique but où mon orgueil aspire,
— Eh quoi ! cher Paon, il me serait permis
D'espérer entre nous une union solide ?
— Sans doute, et la raison nous conseille et nous guide :
Mon plumage éclatant éblouira les yeux,
Ta séduisante voix charmera les oreilles ;
Ensemble, tous les deux, » Nous ferons des merveilles,
Et ne serons jamais l'un de l'autre envieux. »

Des artistes les plus fameux
Telle fut et toujours telle sera l'histoire ;
Par le même sentier marchent-ils à la gloire,
Les rivaux de talents se déchirent entre eux.





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