Au milieu d'un riant jardin,
Sur un trône épineux, tout couvert de verdure,
Une rose exhalait les parfums de son sein,
Etalait les attraits reçus de la nature ;
Elle comptait le septième matin,
Depuis l'heureux instant où la vermeille aurore
Avait répandu sur son teint,
Les premiers traits de feu dont sa brillante main
Embellit ces filles de Flore.
Elle était belle et ne l'ignorait pas:
L'onde pure du voisinage
Avait plus d'une fois réfléchi ses appas;
Et de plus vaniteuse, on l'est trop au bel âge.
Un aimable berger, au printemps de ses jours,
Se présente un matin pour cueillir notre belle;
Avant, il lui tient ce discours:
« Reine des fleurs, calmez votre rigueur cruelle;
» Venez, daignez orner mon tranquille séjour:
» Que j'aime à contempler votre beauté divine !
» Vous serez en tout temps l'objet de mon amour... »
Aussitôt il avance une main enfantine.....
Téméraire berger! arrête, et connais-toi;
Arrête, et respecte mes armes.
Moi d'un berger suivre la loi!
Pour quelque dieu sont réservés mes charmes.
Le berger, à pas lents, s'en va œil plein de larmes.
Au pied de son trône épineux
Gisait, en un cercle hideux,
Sous une large feuille, une horrible chenille.
(Fuis tout reptile impur, entends-tu, jeune fille?)
Ce reptile rampant, à travers mille traits,
Se glisse a petits plis jusqu'' la souveraine;
En grenadier ravage ses attraits,
S'érige en sentinelle au sein de notre reine.
O quelle barbarie! ô quelle cruauté!
L'Amour, les Zéphyrs en pleurèrent;
Traiter ainsi la céleste beauté!
Les papillons se lamentèrent.
La rose regretta les soupirs du berger;
Mais le berger, pour son grand jour de fête,
Était allé, dans un charmant verger,
Cueillir une humble violette.
Retiens bien la leçon, orgueilleuse coquette.