La Violette et la Tulipe Théodore Lorin (19è siècle)

« Voyez mes brillantes couleurs,
Disait la tulipe coquette
À la plus obscure des fleurs,
L'humble et timide violette.
Mon calice élégant et mon port gracieux
Des amateurs charment les yeux. »
« Je ne tenterai point une lutte inégale,
Lui répondit sa modeste rivale.
Je pourrais cependant vous parler sans orgueil
De ce doux parfum que j'exhale,
Et qui me vaut souvent un favorable accueil
De mainte gentille bergère,
À la taille fine et légère,
Qui, douce et simple comme moi,
Me donne à son ami pour gage de sa foi.
Et puis, sans rechercher un hommage futile,
Dans mon réduit obscur je sais me rendre utile.
Les hommes tirent de mes fleurs
Une boisson qui calme leurs douleurs.
Bref, vous brillez, moi je cache ma vie.
De votre aspect tout le monde est séduit ;
On vous admire, et moi, l'on me chérit :
A votre sort dois-je porter envie ?... »

Livre VIII, Fable 14




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