Nonchalamment étendu sur la terre,
Et fier de son lit de fumier,
t’a melon sur ce ton altier,
Apostrophait le maître du tonnerre :
– Bon Jupin, ta sagesse est parfois en défaut ;
Souvent ta divine puissance
S’évertue à faire d’un sot
Un personnage d’importance.
Quand tu donnas celte grosseur
Au Potiron, mon camarade,
Il fallait de ma chair lui donner la saveur.
Des légumes c’est le plus fade,
Mais sans travail il croit, du moins ;
Et tandis qu’à force de soins,
D’arrosements et de culture,
Je parviens à peser trente livres au plus ;
Par une erreur de la nature
Dont tu devrais être confus,
Cette inutile et lourde masse,
Va peser deux quintaux, et tenir plus de place
Que vingt beaux Cantaloups.— Le maître des saisons.
Dont la touchante prévoyance
Fait croître et mûrir les moissons,
En ces mots répondit à son impertinence :
—Est-ce donc un mal qu’à grands frais
Ton fruit mûrisse chaque année ?
Du riche (latter le palais,
C’est la brillante destinée
Qu’en quittant son fumier va chercher le Melon ;
Mais en fixant les lois de la sage nature,
Quand je fuis croître sans culture
Les larges lianes du Potiron,
Du pauvre, cette fois, avec quelque raison,
J’ai ménagé la nourriture.