Je ne sais pas pourquoi ce maudit jardinier
Vient te placer sur moi, me fait ton prisonnier ;
Dans un cercle borné devrait-il me contraindre ?
D'un pareil procédé j'ai sujet de me plaindre ;
Je profiterais mieux en pleine liberté.
Ainsi, dans un jardin de la grande cité,
Parlait, avec humeur, le melon à la cloche.
Au jardinier tu fais un injuste reproche,
Répondit celle-ci, car ta maturité,
Mon ami, tu la dois à cette prévoyance.
Mon abri bienfaisant protège ton enfance,
Des injures du temps je sais te garantir ;
Sans moi tu périrais avant que de fleurir ;
Je concentre sur toi la chaleur salutaire
Du globe que l'on voit briller sur l'hémisphère,
Et tu deviens enfin, par mes soins généreux,
Digne d'être placé sur la table des dieux.
Notre pauvre étourdi, frappé de ce langage,
Sentit qu'il avait tort, se tut et fut plus sage.
Ceci s'adresse à vous ; écoutez, jeunes gens :
Vous êtes le melon, et l'école est la cloche ;
Les soins du jardinier sont ceux de vos parents :
N'allez pas du melon leur faire le reproche.