On immolait un bœuf à Jupiter.
Un condor l'aperçut du vaste sein de l'air,
Et prit sur le bûcher sa part du sacrifice : •
C'est, disait-il, avec justice
Que je prétends faire ici mon repas ;
Chacun sait que l'aigle est mon frère,
Il est l'ami du maître du tonnerre,
Et Jupiter en fait grand cas ;
Sur son dos, dans l'olympe il porta Ganimède :
C'est donc raison que ce dieu-là me cède
Quelque peu de son bœuf ; il doit récompenser
Nos services sans balancer.
Comme il dit, un faucon aux ailes étendues
S'abat aussi du haut des nues :
Je prétends de ce bœuf enlèver mon lopin,
L'Aigle, dit-il, est mon cousin ;
Ce foudre dont les coups épouvantent la terre,
Mon cousin le tient dans sa serre :
Dinons donc. Mais bientôt arrive le milan,
Autre cousin de l'aigle, il en dit tout autant,
Prouve son droit, enlève sa pitance.
Or, des cousins nombreuse était l'engeance,
On vit arriver tour-à-tour
La crcsselle, le duc, l'épervier, le vautour,
Le gerfault, vieil ami du père,
Et l'émérillon, son compère ;
La chouette, le chat-huant
L'avaient connu petit enfant.
Enfin chaque voleur de la gent volatile.
Se prétendant de l'aiglonne famille.
Enleva son morceau. Le dieu n'eut que les os.
Princes, vos favoris... Mais chut !... point de propos.

Fable 12




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