Dans la tête d'une pagode
Certain Rat s'était confiné.
Trouvant l'asile aussi sûr que commode,
Il y vivait comme un prédestiné.
Un dévot pèlerin venait-il, en offrande,
Déposer sur l'autel quelque friand morceau,
Le Rat n'avait besoin d'aller à la provende ;
Il tirait sa part du gâteau.
Selon même ce qu'on raconte,
Il n'était pas sans vanité,
Humant volontiers pour son compte
L'encens qu'on adressait à la divinité.
Ajoutez que, tapi dans sa niche sacrée,
Il insultait à tous les chats
Qui de ce temple avaient l'entrée,
Bien sûr que ces messieurs ne l'attaqueraient pas.
Mais quoi ! rien n'est stable ici-bas.
La pagode sans doute était mal assurée ;
Un beau jour elle tombe et se brise en éclats.
Notre saint déniché ne sait alors que faire.
Chats de toutes couleurs, blancs ou noirs, bruns ou gris,
Ont inondé le sanctuaire.
Nul trou pour se cacher ; il veut fuir, il est pris.
Un gros matou lui dit, l'œil ardent de colère,
Qu'il te souvienne, maître fat,
D'avoir cent fois, du haut de ton idole,
Injurié le peuple chat.
Ton protecteur n'est plus ; sa chute te désole.
Ta mort enfin va nous venger.
Le Rat cherche à répondre ; il n'a plus la parole.
Le matou vient de le manger.
Malheur à quiconque s'oublie
Au sein de la prospérité !
Tombe-t-il dans l'adversité ;
Loin de le plaindre, on l'humilie ;
Chacun lui dit : - Gros Jean, tu l'as bien mérité.