Le Loup et la Brebis Antoine Vitallis (1749 - 1830)

Un loup, à la faveur d’une nuit fort obscure, Par je ne sais quelle ouverture. S’introduisit dans un parc de moutons. Ce loup, étant le plus fin des gloutons, Mit à profit cette bonne aventure, Et s’ accostant d’une jeune brebis : Ma commun:, je suis d’avis, Dit-il, en lésant la voix douce, Que dans le pré voisin, paré d’un verd tapis, Nous serions, vous et moi, mieux, couchés, mieux nourris Que dans ce parc, où brin d’herbe ne pousse. Chiens et berger» sont endormis ; Suivez-moi ; je sais une issue, Qui nous permettra de sortir ; Mais gardez-vous d’en avertir Qui que ce soit : car la chose étant sue , Tout le troupeau voudrait venir ; Plus de secret, partant plus de plaisir. D’ailleurs au bruit causé par la cohue, Chiens et bergers pourraient ne plus dormir. Je ne ferais pareille confidence A nulle autre que vous : Mais je connais votre prudence : Venez, suivez-moi, sauvons-nous.— Le plus sûr moyen de séduire C’est de flatter : noire loup le savait : La brebis se laissa conduire ; C’est où le glouton l’attendait. A peine sortis de l’enceinte, Sur l’innocente il se jeta. Et, sans écouter cris ni plainte , Au fond des bois il l’emporta. Ceci vous touche, jeune fille : Un galant, adroit et soumis, Vous trouve toujours belle, agréable, gentille ; Tout ce qui peut flatter vous est dit et promis ; Méfiez-vous : le loup s’est fait brebis.





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