La Cigale est un peu flâneuse,
Peu prévoyante et trop chanteuse ;
Ce sont là ses mauvais côtés ;
Mais elle a bien ses qualités :
Nul ne sait mieux pardonner une injure.
On connaît sa mésaventure,
Quand, au plus fort de la froidure,
Une voisine, hélas ! d’un tout plein de dédain,
Lui refusa jusqu’au plus petit grain.
Un jour, de grandes fourmis rouges,
Race anglaise, par la couleur,
Et plus encore par le cœur,
En bataillons pressés, s’échappant de leurs bouges,
Enlevaient, en passant, de nombreux pucerons
Pour allaiter leurs nourrissons,
S’applaudissaient de ces tristes victoires,
Et venaient subjuguer de pauvres fourmis noires,
Les asservir, s’emparer de leurs biens,
En faire enfin, chose à peu près égale,
Des Irlandais ou des Indiens.
Du haut d’un buisson, la Cigale,
Apercevant cette bande infernale
Dont elle sait les coupables desseins,
Et voyant à ses pieds
Justement la voisine
Dont, au plus fort de la famine,
Elle n’avait reçu que des refus grossiers,
Descend, vole, l’appelle :
« Vite ! vite ! courez, dit-elle ;
Voici venir votre rouge ennemi. »
Elle aussi court, crie en jetant l’alarme,
Pour rassembler tout le peuple fourmi,
Et trouve un indicible charme,
Au souvenir d’un vieux méfait,
A s’en venger par un bienfait.
Honteuse et repentante,
Mais aussi bien reconnaissante,
La Fourmi vint, pour elle et pour ses gents,
Apporter des remerciements,
Promettant bien désormais d’être bonne,
Et, sinon de prêter toujours ;
Car on en est souvent pour ses débours.
De faire au moins toujours l’aumône.
L'auteur choisit de prolonger l'histoire bien connue, en nous plongeant dans un conflit armé, sans doute avec l'Angleterre. La Cigale n'a ici pour qualité que d'avoir prévenu la Fourmi de l'arrivée des Anglais. Et bien sûr, la morale chrétienne nous apprend qu'il faut pardonner... Bon... Nous n'aurons pas là un grand moment de poésie.