Papa, disait un jeune enfant,
Toi qui m'apprends si bien les choses que j'ignore,
Dis-moi pourquoi cet arbre, en tout point florissant,
Puisque le plus beau fruit le charge et le colore,
Auprès de lui conserve encore
Un tuteur inutile et même embarrassant ?
Mon fils, répond avec sagesse
Le père, qui savait qu'une bonne leçon
Résulte quelquefois d'une comparaison,
Tu conviens que dans sa jeunesse
Cet arbre fut heureux de trouver un appui
Contre les fureurs de l'orage ;
Tu le vois, il est vrai, dans la force de l'âge,
Et pouvant se passer de tuteur aujourd'hui,
Mais, pour cela -, doit-il abandonner celui
Sur lequel autrefois s'étayait son enfance ?
Il voit ce vieil ami sans force maintenant,
Du bien qu'il en reçut il garde souvenance,
Et, par un doux effet de la reconnaissance,
Il soutient à son tour le tuteur déclinant.
J'ai compris, dit l'enfant.
Ce bon tuteur, c'est toi, mon père,
Moi, je suis l'arbrisseau que soutient ton secours ;
Mais, quand je serai grand, mon tour viendra ; j'espère
D'être, par mon travail, l'appui de les vieux jours !