Quelques méchants moineaux, dans la saison des blé
Sur un buisson touffu se trouvaient assemblés ;
Et, voyant les épis onduler à la brise,
Ces gueux de les piller formèrent l'entreprise.
D'un esprit de rapine étant tous possédés,
A risquer le grand coup ils semblaient décidés ;
Mais, au milieu des champs, se dressait, solitaire,
Un être menaçant et de figure austère,
Coiffé d'un vieux chapeau, du plus farouche aspect,
Et qui leur inspirait un singulier respect.
« Voyez ! s'écriaient-ils, ce paysan avare ;
A fauciller nos blés le ladre se prépare,
Nuit et jour il est là qui garde notre bien.
N'en a-t-il pas assez, ne jouit-il de rien ?
De la cave au grenier il entasse, il entasse ; »
Quand veut-il profiter de tout ce qu'il ramasse ? »
Le paysan, chez lui, riait de ces chansons,
Laissant au mannequin la garde des moissons.
Cependant il eut tort : bien fou qui se repose
Sur le respect des gueux pour conserver sa chose.
À la fin, ennuyés, les plus audacieux
Partent en éclaireurs reconnaître les lieux ;
Ils tournent tout autour de l'étrange figure,
Et le plus avisé soupçonne l'imposture.
Il va de çà, de là, s'approche doucement...
« C'est un homme de paille indubitablement... »
Se dit-il, en allant déposer au plus vite
Sur le pauvre chapeau sa carte de visite.
Entendez-vous les cris de nos braves pioupious ?
Sur le vieux mannequin ils ont pris rendez-vous ;
ils y vont tour à tour, faire acte de présence...
Après quoi rondement le pillage commence.
0 brave paysan, surveille ta moisson,
Et profite de la leçon.