Vers, le temps où bientôt la campagne attristée
Va voir se dépouiller et bosquets et buissons,
Un rouge-gorge essayait ses chansons :
« Arrête!… s’écria d’une voix irritée
Certain moineau qui l’avait écouté;
Tu fais paraître ici beaucoup de vanité;
Je distingue lé but où ton orgueil aspire :
Tu veux rivaliser, par ces tristes accents,
Avec les oiseaux du printemps.
Trop faible est ton talent, il n’y pourrait suffire ;
Cesse, crois-moi, des efforts superflus;
Au lieu d’imiter le ramage
De ces oiseaux que nous n’entendons plus,
Tu nous les fais regretter davantage.
Va, ton lot et le mien, c’est de les admirer.
— Tant de rigueurs m’étonne,
Répond le chantre de l’automne.
Et je ne sais comment j’ai pu me l’attirer.
Des oiseaux du printemps moi-même je proclame
Les adorables chants ; mais leurs divins concerts
Sont-ils motifs pour qu’on me blâme
De faire entendre quelques airs?
D’atteindre à leur talent je n’ai pas la pensée,
Et si j’élève encore la voix,
C’est pour rompre un instant le silence des bois,
Puisque de ces oiseaux la saison est passée. »
Quoi, des fables encor! des fables, sur ma foi !
Auteur audacieux, quelle est ton espérance?
Lecteur, montre un peu d’indulgence :
Le rouge-gorge a répondu pour moi.