La Couleuvre Fortuné Nancey (? - 1860)

Une couleuvre assez méchante bête.,
Que pour ma part je n'aperçois pas, moi,
Sans répugnance ou sans effroi,
Jusques dans un salon, comme un vrai trouble fête
S'était introduite en rampant.
Si dans ce lieu, certain confrère
Habitué comme elle à se traîner sur terre
Accueillait bien cette étrangère,
Le plus grand nombre en décampant
Evitait le petit serpent.
- D'où vient qu'ainsi l'on fuit à mon approche,
Dit l'animal sur le ton du reproche ?
Qu'ai-je fait ? attendez avant de condamner
— Si le dégoût à ton aspect éclate,
C'est tu le sais, pourquoi t'en étonner,
Qu'on te connaît de longue date.
Comme on fait de la boue, au milieu du chemin,
Tous en se détournant, évitent ton venin.

On trouve dans ce monde, un peu plus qu'on ne pense..
Avec notre couleuvre assez de ressemblance.
Le sage n'y peut rien ; mais comme enseignement
Il a pour le méchant à repoussante face,
Qui ne reste pas à sa place,
Le mépris et l'isolement.

Livre II, fable 16




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