Dans les siècles passés de mort et d'ignorance,
Si l'on en doit juger par ce que de nos jours
De la jeunesse sont les actes les discours ;
Que devaient être de l'enfance
Les faits et gestes, bien souvent,
Surtout à l'égard d'un savant,
Homme incompris alors, et dont la vie austère
Condamnant de son temps l'humeur folle et légère,
S'écoulait tristement dans les privations
Et quelquefois les persécutions.
Un homme un jour, je dois dire un génie,
Était l'objet d'un rire injurieux,
D'une bande en un lieu, contre lui réunie,
De quelques sots, jeunes présomptueux,
Qui, le voyant, ne pouvaient pas comprendre
Qu'un homme grave osât descendre
A souffler dans un tube, et par cette action
A transformer en transparente mousse
Une eau qui dans ce cas cède au vent qui la pousse.
Puis de rire plus fort de sa précaution,
Lorsqu'avec grand soin il enlève
Une bulle qu'il suit avec attention
Jusqu'au moment où dans l'air elle crève.
« Vous riez ignorants ; vous devriez rougir
« Vint leur dire un passant en troublant leur plaisir ;
« Ce qui vous semble un vieil enfantillage,
« Est le fait d'un savant, d'un sage.
« Avec l'esprit léger, propre à de jeunes fats..
« Il est de tels travaux que l'on ne comprend pas ;
« Pourtant je vous veux bien dessiller la paupière.
« Dans cette bulle de savon
« A vos éclats moqueurs offrant une matière,
«.Un homme enfin, il s'appelle Newton,
« Des couleurs et de la lumière
« Va pénétrer le mystère. »
Dès ce moment tout honteux et confus ;
Nos jeunes sous ne riaient plus.
Bonne leçon pour ceux qui ne sachant comprendre
Dans un sage silence au moins devraient attendre.