La Lionne et les Lettres Saint-Joseph

Par mille on compte les flatteurs ;
A côté do la flatterie,
11 est un autre écueil, l'envieuse ironie,
Qui des nobles efforts décourage nos cœurs.
Une Lionne fort savante,
Mais aussi quelque peu pédante,
Accueillait à sa cour, en petit comité,
Et croyant leur venir en aide,
Les Lettrés renommés de la gent quadrupède.
Chacun d'eux y portait avec sobriété
Le tribut de ses vers ou celui de sa prose,
Cette réserve avait sa cause ï.
La dame était pointue, et le trait malveillant
De sa bouche sortait plutôt qu'un compliment.
Approuvant tous son jugement,
Flatteurs de se courber, loin de la contredire.
C'était toujours môme satire,
Toujours mauvais esprit et faux raisonnement.
Aussi tout s'éteignait^ et la prose et la lyre.
La Lionne voyant ce découragement
S'en étonnait tout haut, et nul n'osait l'instruire
D'un motif trop connu do tous.
« Vous devez vous en prendre à vous,
Lui dit un Rossignol qui, sur sa haute branche,'
Se sentait à l'abri des coups ;
Vers le mauvais côté votre esprit toujours penche ;
Vous n'aimez pas la vérité,
Imitant vos travers et poussés par l'envie,
Vos flatteurs au mérite ôtent l'activité ;
A vos arrêts, aux leurs, soit dit sans vanité,
Je ne chanterais pas, s'il me fallait souscrire. »

Le talent, c'est la liberté.





Commentaires