Un Renard bien rusé fut pris dans une trappe,
Tl se lamentait tant qu'un Ours fit double étape,
Pour s'approcher du lieu d’où partait le concert;
« Que le ciel soit béni, Jupiter a souffert, »
Dit le grand scélérat, « que le hasard t'amène, "
Pour me sauver la vie en déchirant ma chaîne. »
« Mais raconte-moi donc, » lui répliqua Martin,
Comment se fit gober une si roué coquin. »
« Par pure humanité,-» lui répondit le traitre,
« Hier soir, en revenant de ma course champêtre,
Je vis un traquenard renfermant un appât;
Craignant qu'un animal imprudent s’y fiat,
Je me dis, dépêchons, enlevons cette amorce;
Je la prends pour sortir, je me fais une entorse,
D'un couple ressort part, me voilà prisonnier,
Et si tu ne parviens à m’ouvrir ce guêpier,
Ou le bien du prochain méditant imprudence,
Ou je m'aventurai pour sauver l'innocence ;
L'on pourra voir demain à l'encan le bourreau ;
Céder au plus offrant ma fourrure et ma peau. »
« Tu garderas ta peau, je le veux, je l'ordonne,
Je défends au bourreau de toucher ta personne,
Et tu peux l'apprêter pour mourir en repos;
Je veux te dévorer sans laisser même un os. »