La Mouche et le Miel Henry Macqueron (1851 - 1888)

Une Mouche voletant,
Trottinant et furetant,
Rencontra dans une office
Un pot plein de ce délice
Que l’Abeille distilla.
« Ah! quel miel que celui-là !
Oh! senteur appétissante !
Oh! couleur réjouissante !
Certes, l'on tient en horreur
Le péché de gourmandise.
Oui, mais après un labeur
On pourra bien sans malheur
Tâter à la friandise.
Goûtons-le. Dieux ! qu'il est doux !
Oh! d’abuser gardons-nous,
Dans la fortune prospère
Le régime est salutaire. »
Des préceptes en voilà ;
Mais les suive qui voudra.
Ainsi va-t-il d’ordinaire.
La Mouche puisa d’abord,
Tout au bord,
Assez mince particule.
Puis de prendre à son trésor
Un peu plus et plus encor,
Elle eût trouvé ridicule
De s’en faire un grand scrupule.
Vraiment, quoi de plus vilain,
De plus sot que l’avarice ?
Et déjà notre novice
Dans son Miel patauge en plein.
Joliment elle y pâture,
Elle y pompe sans mesure,
Si bien que, triste aventure,
La pauvrette s’englua,
D’abord bien s’évertua,
Bientôt plus ne remua,
Et creva.

Fable 51




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