Un houblon , dans un potager
Dédaignant de ramper à terre,
Au sommet d'une perche avait su se loger,
Tandis qu'un jeune chêne, à tous soins étranger,
Languissait, près de là, dans un champ solitaire.
« A quoi sert pareil avorton?
A toi vraiment s'il se compare,
Dit à la perche le houblon ,
Il faut qu'il ait, ma chère, une audace assez rare.
De ton corps élégant la svelte majesté
Suffit pour t'assurer sur lui la primauté.
Il se pare, il est vrai , d'un bouquet de feuillage.
Mais que sa tige est rude et son aspect sauvage.
La terre h le nourrir met bien de la bonté ! »
Une semaine au plus se passe;
Cherchant du bois, le maître, un jour,
Voit la perche, la prend, la casse,
Et dans le potager met le chêne à son tour.
L'arbuste que sa main dirige
Pousse, grandit et voit, dans ce nouveau séjour,
De nombreux rejetons s'allonger sur sa tige.
Que fait notre houblon ? Vite, il court s'enlacer
Dans les rameaux du chêne, où, sans honte, il se loge ;
Et, depuis lors, sans se lasser.
Tous les jours il s'enroue à chanter son éloge !
Ainsi maint flatteur change au gré de son orgueil :
Soyez obscur, sa langue en tout lieu vous déchire ;
Vous aurez beau faire et beau dire,
N'espérez pas alors plus favorable accueil.
Mais qu'un hasard vous mette en vue.
Courant assiéger votre seuil,
Dès l'antichambre il vous salue.