L'ouragan murmurait ; Eole le déchaîne ;
L'atmosphère s'ébranle. Il renverse, il entraîne
Les arbres, les buissons. Le faible chalumeau
Tombe avec son épi. Le vénérable ormeau
Qui tant de fois sous son ombrage
Vit folâtrer les enfants du hameau,
Ne résiste pas mieux à son aveugle rage.
En vain le chêne altier oppose ses cent bras ;
Ses cent bras de la mort ne le sauveront pas.
Un groupe d'arbrisseaux s'offre sur son passage ;
Etroitement unis ils bravent son effort ;
L'un d'eux, le plus grand, le plus fort,
Semble le défier en redressant la tête :
L'ouragan s'indigne ; il s'arrête,
Et dit : Il en est un de vous
Que je veux écraser du poids de mon courroux ;
Écartez donc de lui vos branches tutélaires,
Ou je vous brise tous, arbrisseaux téméraires !
Ils répondent : Malgré ta rage et tes discours,
Nous voulons nous prêter un mutuel secours :
Nous mourrons, s'il le faut ; mais nous mourrons en frères.