Un bon gros chat grincheux batifolait sur l’herbe,
Près des monts, près des bois, chez lui, dans son jardin,
Soudain, il aperçoit un aigle à l’œil superbe
Qui fond du haut des airs sur un pauvre lapin.
Le chat tout indigné va vers le carnivore,
Arrive près le lui, encore stupéfait
Et l’apostrophe ainsi, comme il mangeait encore :
« Quel terrible délit ! Quel horrible forfait !
Je ne vous croyais pas jusqu’à ce point perfide !
Qu’avait fait l’animal pour mériter la mort ?
Rien de mal, je le sais, pauvre lapin timide !
Cruel, confessez-le, vous avez eu grand tort. »
L’aigle entendant alors qu’un gros chat le sermonne
Se retourne et lui dit : « Tu fais un fin docteur ;
Tu nous sers tes conseils ici, comme personne
Et tu parles vraiment comme un prédicateur !
Mais, je t’ai vu, tantôt, dans un coin de la plaine
Sans scrupule croquer un malheureux pinson,
Pourquoi venir ici, pantelant, hors d’haleine,
Me critiquer ainsi, me faire la leçon ?
Va, va, tous tes discours me laissent insensible,
Oui, c’est vrai, je le dis, j’ai tué ce lapin,
Mais au moins je m’abstiens d’aller d’un air terrible
Faire la morale au prochain. »
Inspiré de Gabriel-T Sabatier, que je soupçonne de ne pas l'avoir inventée lui-même.