Le Perroquet et ses flatteurs Jean-Baptiste Voinet (1976 - ?)

Un jeune et brillant perroquet,
Par son impayable caquet,
Amusait les enfants de tout le voisinage.
Tout le jour on venait le voir
Se pavaner sur son perchoir.
« Qu’il est beau, disait-on, quel ravissant plumage !
Qu’il est intelligent, écoutez son langage ! »

Le maître était tout fier de l’éloge flatteur,
Que ses amis faisaient sans cesse
De son élève beau parleur ;
Mais sa fierté bientôt fut changée en tristesse.

Un jour, le mépris dans les yeux,
Avec le regard sourcilleux,
En un seul mouvement, le perroquet se dresse,
Devient tout enragé soudain,
Manque de déchirer la main,
Celle, qui tous les jours le nourrit, le caresse.
« D’où vient donc ce courroux, cette ire vengeresse ?

À la fin, qu’ai-je fait pour que telle fureur ?
Éclate, vilain volatile ?
Êtes-vous un être sans cœur ?
Aujourd’hui vous voilà d’une humeur bien hostile !

Vous voulez me porter des coups ?
Quelle violence tout à coup ! »
L’oiseau répond alors sur un ton très farouche :
« Pas un seul petit mot flatteur
Sur mon talent de beau parleur
Ne sort de votre voix, ne pointe à votre bouche
Et vous vous étonnez quand vient une escarmouche ?

Pourtant chacun ici me trouve des atouts,
Me complimente et puis m’admire
Cependant, de vous, rien du tout ?
Voyons, maître, à cela qu’avez-vous donc à dire ? »

« Je dis que les flatteurs, toujours
Ceux-là, avec leurs beaux discours
Font hélas, on le voit, un bien mauvais ouvrage,
Sachez qu’au gens de cette sorte.
Je fermerai bientôt ma porte
Car ils ont fait de vous un ingrat personnage.
Oui, ils ont fait de vous un ingrat personnage. »

Juin 2022


Inspiré de Gabriel-T Sabatier. Forme complexe.

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